Instant de détente [PV Oliver]

Invité

La fin d'après midi était froide, mais par tout les temps, Salomé allait savourer sa cigarette sous le kiosque, c'était son plaisir. Les Jardins de la Maison des Délices, étaient peu fréquentés, pourtant ils étaient soigneusement entretenu, même si la grisaille et le mauvais temps persistant avait fait perdre de son éclat au lieu. Plus de feuille sur les arbres, seul les conifères résistaient, plus de fleures aux couleurs vives. Tant pis, les branches nues décrivaient des formes fantasques et projetaient des ombres que certains qualifieraient trop rapidement de lugubre. La délicieuse aimait errer dans la nature, et ce depuis qu'elle était petite, les décors qu'elle offrait la fascinait d'une certaine façon. Et puis de temps à autre elle aimait être au calme, et dans une maison comme celle-ci c'était rare. Une fois par jour elle s'exilait.

Elle avait attaché ses longs cheveux blonds en chignon négligé, dont s'échappaient plusieurs mèches. Elle n'était pas apprêtée il était encore tôt, une robe de velours d'un bleu sombre ou couraient quelques motifs alambiquées d'un bleu outremer, petit plaisir qu'elle s'était accordée qui coûtait assez cher pour qu'elle en taise le prix. Mais n'était ce pas une maison de luxe ? Elle porta à ses lèvres sa cigarette qui se consumait seul entre ses doigts gantés. Salomé maintenant d'une main le châle qui lui couvrait les épaules, si ce n'était pas le jardin d'un bordel, elle aurait pu passée pour une femme du monde. Mais ce monde l'exaspérait et elle préférait celui-ci bien plus honnête en fin de compte.

Elle se s'était jamais sentie aussi libre ici, bien loin des leçons de maintiens. Bien loin des manigance des ses parents pour lui trouver un époux digne et riche. Elle en avait vu défiler des maris potentiel, à lui faire une cours hypocrite, tous plus stupide les uns que les autres. Oh bien entendu il y en avait aussi des hommes stupides ici, mais ceux-là venaient pour une raison précise et ne s'embarrassaient pas de futilité. Elle s'était amusé à jouer au couple avec François, noble bien placé, riche à outrance qui l'avait couvert de cadeaux, qui l'emmenait partout et elle le trompait avec tout le monde. S'amusant de sa jalousie et de l'amour qu'il semblait lui vouer, incapable de la quitter alors qu'elle se moquait de lui. Si elle ne l'avait quitté nulle doute que la situation aurait durée éternellement. Il s'y prenait tellement mal avec elle. L'amour est une chose qui rends stupide.

Une silhouette passa devant elle. Salomé reconnut Oliver Caron, un des rabatteurs du Manoir, il vivait pratiquement au Manoir, la plupart des filles l'adoraient, le chouchoutaient, alors qu'il était le responsable de la venue de certaine. Le paradoxe était amusant. Mais il était vrai qu'on ne pouvait pas vraiment lui en vouloir, avec un visage d'ange comme le sien, c'était difficile. Le plus perturbant chez lui était sans doute son regard, d'un noir d'encre, mais qui parvient tout de même à être doux. Elle lui fit un signe pour signaler sa présence.

« Alors Monsieur Caron, pas de nouvelle fille aujourd'hui ? »

Son ton n'avait rien de sérieux, c'était plus dans l'optique d'engager la conversation. Elle aimait bien parler avec lui, étrangement d'ailleurs, elle appréciait réellement sa compagnie, sans faux semblants. Elle se surprenait parfois à jalouser Dawn avec qui il passait du temps. Elle ne le reconnaissait pas bien entendu, et ne laissait rien paraître, puisqu'elle n'en avait même pas conscience, préférant trouver des défauts qui n'existaient pas à Dawn pour justifier son animosité.

Invité

L’hiver, saison bien singulière, saison froide et lugubre pour certains, saison que bon nombre de gens souhaiteraient voir passer le plus rapidement possible pour céder sa place au printemps plus propices aux sorties en tout genre. Je pourrai d’ailleurs moi aussi faire partie de ces gens qui pensent ainsi et ce tout simplement parce que malgré tout, malgré mes origines mais aussi et surtout malgré l’emploi que j’occupe au jour d’aujourd’hui, je suis tout de même quelqu’un comme un autre, un être commun.
Pourtant pour ce qui est de mes pensées quant à l’hiver il n’en est rien et si bon nombre de ceux et celles que j’ai pu côtoyer durant ma vie ne sont pas fanatiques de ce moment de l’année, il est pour moi le moment que je préfère et ce même si je serai bien incapable de vous expliquer le pourquoi du comment de cette réalité qui n’a d’ailleurs probablement pas tant d’importance que cela.

Tout cela pour dire et expliquer la raison pour laquelle, à peine rentrée de mon petit périple en ville, j’ai décidé de me réfugier pour quelques instants du côté du kiosque à musique du manoir, lieu que j’aime par dessus tout depuis mon arrivée au service de la famille Boldwin. Ici rien que du beau, du vrai, pas le moindre petit mensonge, aucun faux semblant contrairement à ce qui se passe dans ma vie depuis maintenant bien des semaines et des mois.
Ici je peux donc être moi même et rien ni personne d’autre, j’ai la possibilité de me laisser aller et de vivre tel que bon me semble. Oh bien entendu je sais bien qu’il ne me faut en aucun cas baisser ma garde ne serait ce même un seul petit instant et ce tout simplement parce qu’il n’est pas certain que je resterai seul bien longtemps et ce même si je ne doute pas que le temps et la fraîcheur des lieux en découragera plus d’un et plus d’une. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’en cet instant seules mes pensées ont le droit d’être telles qu’elles devraient toujours être alors que seules quelques petites choses des plus subtiles pourraient montrer chez moi un changement d’attitude.
Ainsi mes pensées vont vers mon père, vers cette mère qui est la mienne et que je n’ai pourtant jamais connu, mais aussi vers cette femme que j’ai tant aimer et dont la présence à mes côtés nous à entraîner à ma perte pour ma part et à la mort pour la sienne.

Mon regard n’est que quelque peu voilé, un voile presque imperceptible et ma stature et ma façon de me mouvoir ne laissent toujours pas voir que je ne suis autre qu’un fils de paysan purement et simplement illettré. Je suis finalement le Oliver que toutes les filles et que certains hommes du manoir connaissent comme si je n’étai à présent plus capable d’être celui que j’étais avant cette bien sombre histoire, avant que ma vie ne prenne un tournant cauchemardesque.
Je suis donc simplement un Oliver un peu plus dans ses pensées et dans le flou que d’habitude, tellement dans le flou que je n’ai pas vu immédiatement la belle Salomé, une jeune femme qu’il m’est arrivé de croiser plus d’une fois au sein du manoir et qui ne cesse d’éveiller ma curiosité alors que nous semblons finalement passer pas mal de temps à jouer tous deux au chat et à la souris.

Mais lorsque la belle va plus loin que les gestes et prends la parole afin de m’interpeller et de me questionner je ne peux que remarquer sa présence et redescendre un peu plus sur terre afin d’être à nouveau le plus naturel qui soit et le plus possible dans le rôle qui est le mien au sein du Manoir des Délices. D’ailleurs je ne peux à présent qu’espérer qu’elle n’a en aucun cas pris mon temps de réponse et de réaction relativement long pour une façon de la fuir et ce tout simplement parce que tel n’est pas le cas, au contraire je ne peux qu’être heureux qu’elle semble souhaiter échanger quelques mots avec moi puisque j’aime moi même nos petites conversations. C’est ainsi que je ne tarda pas à prendre la parole à mon tour tout en adressant un petit sourire à la jeune femme vers qui je me rapproche d’ailleurs doucement à présent.

-Non, pas de nouvelles compagnes de misères à vous présenter pour le moment très chère mais si tel venait à être le cas je vous en informerait ? Et de votre côté pas trop de problèmes avec vos clients ? Je sais que cela n’est pas mes affaires mais si vous avez besoin d’aide avec qui que se soit n’hésitez pas je trouverai sans doute un moyen de m’arranger pour intervenir.

Une fois encore il semblerait que je n’ai pas pu m’empêcher de jouer au chevalier servant ou du moins d’en prendre les mots alors que j’en ai déjà vraisemblablement l’apparence mais que voulez vous je suis ainsi il ne faut pas l’oublier et ce même si je devrai sans doute moi même parfois oublier cette partie de ma personnalité afin de ne pas avoir d’ennuis, ennuis auxquels je ne pense d’ailleurs pas encore, préférant faire semblant d’avoir une conversation « normale » avec la belle Salomé et ce même si nos situations à l’un et à l’autre n’ont rien de très normal.